Le tombeau de Verlaine
Paul
Verlaine s'éteint le 8 janvier 1896 à 19h 30, et la cérémonie religieuse
à l'Eglise Saint-Etienne Dumont est organisée le 10 janvier.
Dans le "Petit parisien" du 11 janvier on put lire, signé d'un anonyme :
"Les obsèques du poète Paul Verlaine ont eu lieu hier. Ses nombreux amis et admirateurs se sont réunis, vers dix heures du matin au 39, rue Descartes chez mademoiselle Eug énie Kranz. Le lit était couvert de fleurs. Le cortège estimé à cinq mille personnes, suivit la rue Soufflot, la rue de Médicis, la rue de Tournon, la place du Carroussel, la place de l'Opéra, etc. Les Cordons du poêle étaient tenus par MM François Coppée, Maurice Barrés, Catulle Mendés et Edmond Lepelltier.
M. De Sivry, beau-frère de Verlaine conduisait le deuil en l'absence du fils malade, à Nancy. Un grand nombre de littérateurs étaient présents parmi lesquels MM Sully Prud'homme, Meilhac, Raoul Ponchon, Jules Lemaître, Gabriel Vicaire, Moréas, Courteline, Tailhade, Mallarmé, José de Hérédia, l'éditeur Vanier, Maurras, Gustave Kahn, le comte de Montesquiou, Charles Morice…
Des discours furent prononcés au cimetière des Batignolles par MM
Coppée, Barrés, Mendés, Lepelltier, Mallarmé et Moréas qui ont dit
l'influence considérable exercé sur la nouvelle école littéraire par
l'auteur de Sagesse. Des couronnes ont été déposées sur la tombe au nom
d'amis, de son éditeur, de l'Association générale des étudiants et de
plusieurs groupes littéraires.
Ils ont dit…
Barrés
"La jeunesse intellectuelle dépose sur cette tombe l'offrande de son admiration"…"une figure populaire que nous n'aurons plus le bonheur de rencontrer…" … "…Nous ne lui disons pas adieu. Nous penserons souvent à lui et il continuera à nous enseigner le réalisme comme point d'appui de toute production artistique, la connaissance de notre tempérament comme seul précepte de rhétorique, et comme règle générale de conduite, le dédain absolu de la mode, parce que d'ailleurs tôt ou tard elle vient toujours à ceux qui ont l'estime des gens comptétents"…
Mallarmé
"Apprenons, messieurs, au passant, à quiconque, absent, certes, ici, par
incompétence et vaine vision se trompa sur le sens extérieur de notre
ami, que cette Tenue, au contraire, fut, entre toutes, correcte. Oui,
Les Fêtes galantes, La
bonne chanson, Sagesse, Amour, Jadis et naguère, Parallèlement ne
verseraient-ils pas de génération en génération, quand s'ouvrent, pour une
heure, les juvéniles lèvres, un ruisseau mélodieux qui les désaltèrera
d'onde suave, éternelle et française…"
Jean Moréas
"Des derniers classiques à Victor Hugo, de Victor Hugo à Lecont e de Lisle, de Leconte au plus jeune d'entre nous, comme Villon à Ronsard et de Ronsard à Malherbe et à Jean Racine, cette poésie, la poésie française, nous invite à pleurer la perte d'un des plus grands esprits."
"…Adieur donc, Paul Verlaine, et quelles que soient les chances diverses qui attendent la poésie dans votre pays de France, votre nom ne périra pas."
La Société des Amis de Verlaine fut fondée en 1896 par les survivants au poète. C'est en 1966, que la tombe de Paul Verlaine fut remise en état et déplacée, Jules Romain en était son président du moment (voir doc. inédits). Le tombeau gagna une place centrale au Cimetière des Batignolles, lors du premier centenaire, un hommage lui fut rendu en présence de personnalité du ministère de la culture.